Blog - Pourquoi la Russie fait-elle la guerre à l’Ukraine ?

Pourquoi la Russie fait-elle la guerre à l’Ukraine ?

Qui aurait pu l’imaginer, il y a à peine deux semaines, quand la flamme olympique, symbole de paix, brûlait sur Pékin ? Depuis le 24 février, pourtant, l’Europe connaît la guerre sur son sol. Les images de combats violents et d’Ukrainiens en souffrance, et la détermination du Président russe ont de quoi faire peur.

Que se passe-t-il dans l’est de l’Europe ?

© Reuters

Le 24 février dernier, un pays souverain en a attaqué militairement un autre au cœur du continent européen, ce qui n’était pas survenu depuis la Seconde Guerre mondiale, à l’exception des conflits nés de l’éclatement de la Yougoslavie en plusieurs Etats indépendants, dans les années 1990.
Cette nouvelle guerre a été provoquée par le Président russe Vladimir Poutine, qui a décidé d’envoyer sa puissante armée envahir l’Ukraine, son voisin, dans le but de faire tomber son Président, l’ancien comédien Volodymyr Zelensky, démocratiquement élu en 2019 et très populaire dans le pays.

Pourquoi la Russie a-t-elle décidé d’attaquer ?

© Alternative économique

Vladimir Poutine a commencé par justifier l’intervention militaire en expliquant que son armée devait défendre deux régions ukrainiennes dont les gouvernements, favorables à la Russie, veulent se séparer du reste du pays.

Situées dans le Dombass, une région de l’est de l’Ukraine, ce sont les républiques autoproclamées de Donetsk et de Lougansk. Une guerre silencieuse, mais qui a fait des milliers de victimes, existe dans cette zone depuis huit ans.

Le Président russe a accusé le gouvernement ukrainien de perpétrer sur place un « génocide », ce que personne n’a pu ni constater ni vérifier. Le 21 février dernier, Vladimir Poutine a reconnu l’indépendance de ces deux régions, alors que tous les autres pays du monde les considèrent comme des entités ukrainiennes.

C’est quoi l’Ukraine, quelle est son histoire ?

Grand comme la France, ce pays de 44 millions d’habitants parmi les plus pauvres du continent est un Etat jeune. Il a célébré, en août 2021, le trentième anniversaire de son indépendance. Trois décennies agitées, marquées par un éloignement de plus en plus marqué de la Russie et un rapprochement de l’Union européenne, où les Ukrainiens peuvent circuler sans visa.

Pourtant, dès ses premières années d’existence, lUkraine est divisée entre ses habitants attachés à leur passé soviétique et ceux qui veulent se rapprocher de l’Union européenne. A deux reprises, ces deux camps vont s’affronter sur la place de l’Indépendance, à Kiev. D’abord lors de la « révolution orange » de 2003, qui aboutit à l’arrivée au pouvoir d’un Président tourné vers l’Europe. Puis, en 2013 et 2014, alors que le Président est cette fois un proche de la Russie : après des affrontements très meurtriers, le Président est renversé, et remplacé par un gouvernement pro-européen.

Vladimir Poutine dénonce alors un « coup d’Etat » mené par une « junte nazie ». Il décide en 2014 d’envahir la Crimée, une péninsule du sud de l’Ukraine donnant sur la mer Noire. Il revendique depuis son annexion officielle. Peu après, il s’en prend aux territoires de la région du Dombass. Ceux dont il vient de reconnaître l’indépendance.

Que penser des arguments de Vladimir Poutine ?

Vladimir Poutine © DM - Institut Montaigne

Ses accusations de « génocide » ou de « junte nazie » visant le pouvoir ukrainien ne tiennent pas, surtout lorsque l’on sait que le Président Volodymyr Zelensky est de confession juive !
Mais pour Vladimir Poutine le choix de l’Ukraine de demander à adhérer à l’Otan, une alliance militaire sous commandement des Etats-Unis entre pays d’Amérique du Nord et d’Europe, est inacceptable. Plusieurs fois, il a déclaré vouloir que l’Ukraine devienne un pays démilitarisé, et neutre. Cela revient, dans son vocabulaire, à lui donner un gouvernement favorable à la Russie. Dans cette hypothèse, l’Ukraine ne pourra jamais demander souverainement à adhérer à l’Union européenne ni bien sûr à l’Otan.

Pourquoi cette guerre est-elle inquiétante pour les Européens ?

© Aris Messinis / AFP - 24 février, 5 heures du matin, les premiers missiles russes touchent l’Ukraine. Cette fumée noire émane d’un aéroport militaire, à Tchouhouïv, dans l’est du pays.

Pour deux raisons au moins.

  • D’abord, elle montre que le Président russe ne comprend que le langage de la force, et qu’il ne se soucie pas des discussions et négociations si elles ne lui permettent pas d’obtenir ce qu’il veut. Donc s’il veut ramener un jour d’autres pays est-européen, autrefois membre de l’Union soviétique ou proches d’elle, dans le giron de la Russie, il ne reculera sans doute pas. Surtout si on lui montre, aujourd’hui, qu’on le laisse faire. La menace concerne, potentiellement, les pays baltes (Lituanie, Lettonie, Estonie), mais aussi la Pologne ou d’autres, au sein de l’Union Européenne ou de l’Otan.
  • Et puis, si Vladimir Poutine est si agressif, c’est qu’il dispose de la deuxième armée du monde, une force surpuissante, équipée de l’arme nucléaire et d’autres armements de pointe qui peuvent toucher des cibles lointaines, y compris, sans doute, dans l’espace (des satellites). Il a déjà brandi cette « dissuasion » comme une menace, ce qui ne veut pas dire qu’il passera à l’acte, mais qu’il peut l’envisager et le faire savoir, pour faire plier ses interlocuteurs.

Comment les Européens ont-ils réagi jusqu’ici ?

© Pixabay

Du monde entier, les mesures de sanction contre la Russie ont afflué en quelques jours, dans de nombreux domaines, pour tenter de mettre à mal l’économie du pays. Elles s’attaquent aux portefeuilles des dirigeants et entreprises russes, y compris les proches du Président Poutine, pour empêcher le financement de la guerre, et provoquer la colère de la population contre les responsables de cette situation.

Les espaces aériens sont fermés, les liens commerciaux sont rompus, les opérations avec les banques russes interdites, les livraisons de commandes industrielles stoppées, les sportifs russes exclus des compétitions, comme du prochain Mondial de football au Qatar…

Particulièrement symbolique, un grand projet de livraison de gaz russe à l’Allemagne, Nord Stream 2, a été suspendu. Un vrai coup dur pour le pays qui tire une grande partie de sa richesse du secteur de l’énergie.

Beaucoup de pays ont aussi annoncé des livraisons d’armes à l’armée ukrainienne. Mais aucun pays n’a proposé d’envoyer des hommes pour se battre à ses côtés.

Dans quelle situation se trouvent les Ukrainiens ?

Ces trois adolescentes se sont réfugiées dans le métro de Kiev afin d'échapper au danger qui règne dans la ville.© DANIEL LEAL/AFP

Au 1er mars, quelque 660 000 Ukrainiens avaient dû quitter leur pays pour trouver refuge dans un pays voisin, Pologne ou Roumanie en tête. Et près d’un million d’entre eux étaient considérées comme déplacés : toujours en Ukraine, ils ont fui leur domicile pour échapper aux bombardements. Cette situation de chaos crée un fort besoin humanitaire : pour accueillir les populations réfugiées, et pour fournir des vêtements, de la nourriture, des médicaments ou des produits d’hygiène aux Ukrainiennes et Ukrainiens. L’ONU a estimé que 12 millions de personnes auraient rapidement besoin d’aide dans le pays.

Photo d’ouverture : © Wojtek RADWANSKI / AFP

Helena et son petit frère Bodia, originaires de Lviv (ouest de l’Ukraine), ont été obligés de fuir. Ils attendent de l’aide dans le froid à la frontière avec la Pologne, pays de l’Union européenne. 

Écrit par Jean-Yves the First Publié le 14 mars 2022

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